Une majorité de dirigeant.e.s et de managers sont à l’affut des méthodes et des outils permettant de développer ou transformer leur organisation, entreprises ou fédérations, ou bien pour motiver, souder et engager leurs équipes.
Certains ont peut-être entendu parler de l’intelligence collective, mais cela reste souvent un concept très général. Ils se figurent difficilement comment la mettre en œuvre concrètement à leur propre situation, et surtout comment faire pour qu’elle débouche sur des actions concrètes.
Dépasser les freins du collectif dans les entreprises et les organisations
Les approches proposées sont souvent théoriques ou « perchées ». Elles ne correspondent pas toujours aux besoins concrets et pragmatiques des organisations, surtout dans les situations urgentes.
Parfois, parler d’intelligence collective fait même ressurgir des images :
- des longs palabres où l’on en profite pour traiter ses emails
- des discussions âpres dont les participants sortent déçus et démotivés
- de douces rêveries qui ne mènent à rien, sinon à de faux espoirs de changement
- ou encore de soi-disant consultations alors que les décisions sont déjà prises
Sans doute reconnaissez vous ces situations.
Vous savez qu’elles provoquent au mieux de la déception et de l’indifférence, au pire du désengagement et du sabotage.
Je comprends les interrogations à l’égard de l’intelligence collective.
J’ai personnellement vécu de telles réunions.
C’est parce que je me suis trouvé dans des impasses où l’action collective et la concertation étaient remises en cause que j’ai ressenti le besoin impérieux de trouver des méthodes, des outils et des guides pour dépasser ces freins.
Et vous savez quoi ? La collaboration fonctionne comme une voiture : il suffit de desserrer le frein à main pour avancer.
Est-ce vraiment si facile? Avec les bons outils, oui!
Pour vous convaincre, je partage dans cet article le témoignage de la mise en œuvre d’une méthode d’intelligence collective au service d’une situation concrète.
Vous verrez comment des outils adaptés permettent d’atteindre des résultats pragmatiques et mesurables :
- création de nouveaux services et de richesses
- renforcement de l’adhésion des équipes autour de projets communs
- gains de temps et d’argent dans la mise en œuvre des projets
L’exemple d’un groupe de travail stratégique utilisant une méthode d’intelligence collective
Présentation du contexte
La situation concerne une fédération internationale qui réunit des associations de différentes nationalités, et des entreprises, grandes et petites. Cette fédération intervient essentiellement sur les questions de normalisation, d’environnement et de sécurité (information et formation) pour défendre ses adhérents, notamment vis-à-vis de la règlementation, et pour promouvoir l’activité de ses membres.
Le contexte de cet exemple d’application de méthodes d’intelligence collective est celui de discussions internes houleuses entre plusieurs catégories de membres autour des questions de certification, de normalisation, et de promotion.
Les parties prenantes restent focalisées exclusivement sur leurs intérêts opposés ; les discussions semblaient être arrivées à un point de non-retour.
Le Président de la Fédération convoque un Groupe de Travail Stratégique pour définir des axes fédérateurs afin de sortir de l’impasse.
Ce groupe comprend 8 membres du Comité de Direction, de nationalités différentes et représentatifs des tendances qui s’opposent.
Choix de la méthodologie et préparation de la réunion
Le défi est de définir ce projet stratégique fédérateur en une seule journée (2 réunions de 4 heures) afin de présenter à l’Assemblée Générale pour validation, et de relancer une dynamique positive dans le contexte décrit ci-dessus.
Le Président accepte de recourir à une méthode de facilitation orientée solutions adaptée à la mise en place de projets avec définition de plans d’action.
Dès la convocation, les participants sont informés des objectifs de la réunion et de l’utilisation d’une nouvelle méthode.
Toujours avant la réunion, les éléments clés sont définis et validés avec le Président :
- L’objectif de la réunion : sortir avec un plan stratégique recueillant l’accord de tous les participants
- La recherche d’un consensus ou à défaut, le recours à un vote majoritaire
- Une première liste d’axes stratégiques possibles, étant entendu que les participants pourront l’enrichir et choisir ceux qui seront travaillés
- Le cadre : la méthode utilisée, l’animation par un facilitateur formé à la méthode, le rôle de chacun, le timing
La conduite de la réunion
Positionnement d’un cadre clair et sécurisant
Dans notre exemple, la méthodologie est proposée dès le début de la réunion en expliquant qu’elle répond aux objectifs définis par le Président et le bureau et aux contraintes logistiques et de temps des participants.
Chacun est assuré de pouvoir exprimer ses points de vue et les intérêts dont il a la responsabilité.
La méthode en elle-même repose sur 5 étapes qui s’inscrivent dans un cadre de temps très restreint de 30 minutes au total :
- La définition d’un objectif clair
- Une interview d’un participant (le porteur ou l’avocat du projet) sur la manière dont cet objectif spécifique pourrait être atteint
- Une session d’enrichissement avec l’ensemble du groupe pour enrichir le projet par les propositions croisées des participants
- L’évaluation du projet par le groupe de travail
- La décision finale de donner suite au projet ou non, et dans le cas d’une approbation (« go/no go »), la définition de la première action à mettre en œuvre.
Partir des problématiques concrètes rencontrées
Première étape préalable et nécessaire à la méthode, les participants sont invités à définir 4 axes prioritaires. Ils choisissent parmi la douzaine de propositions préparées en amont en fonction des problématiques, défis et enjeux auxquels la Fédération avait fait face depuis 2 ans . Ils peuvent aussi proposer d’autres sujets.
Ces objectifs sont redéfinis sous forme constructive (intention / action) en tenant compte des positions parfois contraires des participants, par exemple :
- objectif 1 faire une action A
- objectif 2 : faire une action contraire ou différente de l’action A
Cette présentation reflète la situation de débat au sein de l’organisation.
Ce sont les participants eux-mêmes qui décident des 4 axes/objectifs prioritaires par un vote confidentiel.
La méthodologie pour définir et élaborer les projets stratégiques à partir de ces 4 propositions est appliquée à chacun d’eux successivement.
Il y a donc 4 sessions de travail réparties sur la journée, environ 1h30 par objectif : mise en place, le « sprint » de 30 minutes, l’organisation concrète du planning (qui, quoi, quand, comment) de 30 à 45 minutes et la conclusion.
Favoriser l’expression de la richesse de chaque point de vue
Les méthodes de facilitation en intelligence collective s’appuient sur des caractéristiques communes qui permettent de créer les conditions de l’efficacité collaborative entre les membres.
Elles divergent toutefois dans leurs modalités pour tenir compte des situations spécifiques de chaque groupe et apporter des réponses adaptées à chaque besoin.
Dans l’exemple présenté, la méthodologie reposait sur :
4 rôles principaux :
- Un facilitateur (animateur) garant du cadre et du respect de la méthodologie
- Des porteurs de projets auto-désignés : un par projet
- Des consultants qui ont coconstruit le projet, l’ont précisé et enrichi
- Des gardiens du temps et de la brièveté
Des étapes distinctes, organisée et successives :
- La présentation de l’objectif de chaque projet
- Un canevas d’interview précis et adapté à chaque situation
- Une phase d’enrichissement et de créativité reposant sur des règles très codifiées pour éviter les messages limitant, voire destructeurs, ou la monopolisation de parole
- Une phase d’évaluation et de décisions prises collectivement
Pendant chaque session de travail, des notes prises sur paperboards et support électroniques ont permis de conserver les propositions et les enrichissements des projets.
A l’issue de chaque session, le groupe de travail a consacré environ 45 minutes à analyser, trier, reclasser, prioriser ces notes pour définir en commun le plan d’action définitif de chaque projet et les suites à donner.
Les facteurs de réussites de la méthode :
- Organiser la pensée et clarifier l’énoncé
- Placer le projet et la fédération au centre de la démarche
- Proposer une démarche d’analyse en mode projet
- Alterner phases d’écoute active et de créativité
- Transformer les objections en suggestions d’amélioration ou en propositions alternatives
- Maintenir un rythme rapide dans le processus pour aller à l’essentiel
- Mettre en action le projet avant de conclure la réunion
Des réalisations concrètes, des délais rapides, le soutien de tous
L’application de cette méthode d’intelligence collective a permis d’identifier 4 axes stratégiques en 2 sessions de travail de 4 heures chacune. Les participants ont pu dépasser les postures et les oppositions de forme, de principes ou de fond exprimées avant la réunion.
3 de ces axes ont été présentés et approuvées par Comité de Direction, puis par l’AG des membres.
Cette méthode et d’autres réutilisées dans des phases ultérieures de ces projets ont permis une accélération de leur mise en œuvre.
Cela représente un gain de temps et d’argent de 75% environ par rapport aux pratiques habituelles :
- 6 à 8 mois de travail pour leur finalisation, contre 18 à 24 mois pour des projets similaires
- des réunions plus courtes et efficaces
- des dizaines de milliers d’euros économisés par les entreprises : temps dirigeants ou managers et frais de déplacement
Sans compter :
- le regain d’intérêt, l’envie de participer et de contribuer aux travaux communs grâce à l’accélération du tempo et au respect des contributions de chacun pour la fédération
- plus de 20% de chiffre d’affaires supplémentaire en 12 mois sur une activité innovante.
Conclusion : une nouvelle dynamique autour d’un projet commun
L’application d’une méthode d’intelligence collective bien choisie a créé les conditions favorables à la coconstruction d’un programme d’actions stratégiques pendant la réunion et au-delà de cette réunion.
Les effets bénéfiques de cette méthode se sont fait sentir pendant plusieurs mois en impliquant les membres de la fédération autour de thèmes consensuels, et en dépassant les oppositions entre les entreprises et associations membres.
Les différences, les intérêts et les sensibilités de chacun ont été écoutés, respectées et intégrées dans les projets. Elles ont renforcé et assuré leur pérennité dans le temps. Ce résultat a été obtenu dans un délai très rapide. Les résultats ont été concrets et significatifs.
Franck VERGUET
Consultant en conduite d’accompagnement au changement
Facilitateur en Intelligence Collective
LIDEA Conseil
De l’idée à l’action
Contact : f.verguet@lidea-conseil.com
Tél : 06 22 74 67 25